Témoignage de Maryam
Maryam est originaire de Garges les Gonesse, une des villes les plus pauvres de France.
Elle était plutot bonne élève et a intégré la prestigieuse université Paris Dauphine.
Elle s’est beaucoup autocensuré et nous donne aujourd’hui son point de vue et ses conseils !
Retranscription complète de l’interview
Bonjour Maryam, Peux-tu te présenter ? Qui est tu ? Que fait tu dans la vie ?
Bonjour donc je m’appelle Maryam comme tu l’as dit, j’ai 31 ans, je suis enseignante de SES, donc de sciences économiques et sociales .
Donc j’enseigne au lycée l’économie, la sociologie et les sciences politiques Voilà je suis originaire du 95, donc j’ai grandi jusqu’à mes 26 ans à Garges les Gonesse dans le 95, qui est une des villes les plus les plus pauvres de France, Voilà.
Merci Maryam, au niveau de tes études, peux tu nous dire comment ça s’est passé au collège, au lycée, l’orientation puis les études supérieures ?
Alors ma mère a fait le choix donc de me mettre dans le privé, ce qui n’a pas été le cas de mon frère et de ma sœur, donc je suis la dernière, j’ai un grand frère, une grande sœur.
J’ai été dans le privé à partir de la primaire parce que j’étais inscrite en sport études, donc le matin je faisais de la gym et l’après-midi j’allais à l’école.
J’ai arrêté au collège parce que j’étais très nulle en gym et ça ne me plaisait pas, j’ai continué dans le privé donc à Stains.
J’ai ensuite, j’ai poursuivi au lycée toujours dans le privé à Saint Denis et après le lycée Donc déjà pendant le lycée s’est posé la question de mon orientation, Quelle filière faire
Bien évidemment Ma mère aurait aimé que je fasse une S, La la voix qui jouit d’un très grand prestige est qui est réputé comme ouvrant toutes les portes Mais je n’étais pas à l’aise en mathématiques, j’étais pas non plus à l’aise dans les matières scientifiques globalement sans est mauvaise, je n’étais pas ni alaise, ni bonne d’ailleurs, et mon professeur de l’époque m’avait conseillé vu mon profil une ES, que j’ai choisi Et du coup j’ai eu un BAC ES, donc j’ai obtenu mon BAC, S’est posé la question ensuite de la poursuite de mes études dans le supérieur, Et là ça a été la grande difficulté parce que je n’avais aucune idée de ce que je pouvais faire, Il y avait de nombreux métiers qu’ils m’était complètement inconnus
Des métiers comme le contrôle de gestions, comme je ne sais pas moi travailler dans la gestion de patrimoine enfin, des métiers qui m’était inconnue et j’ai fait un peu mes choix par défaut Alors là où j’ai de la chance c’est que j’étais une bonne élève, j’étais la première de ma classe et j’ai postulé dans des prépa, ce que m’avait conseillé mes enseignants Mais je ne savais pas du tout à l’époque ce que c’était une prépare, dans quel univers ça pouvait aboutir Et j’ai aussi postuler… mais alors vraiment par hasard à Dauphine qui était un établissement que je ne connaissais pas, parce qu’une copine à moi postuler à Dauphine, tout simplement Et je me suis dis ah ça a l’air cool, je vais postuler aussi c’est qu’après avoir postulé que j’ai un peu compris que c’était un établissement, un établissement renommé, D’ailleurs c’était la seule fac qui recrutait sur dossier et j’ai été à ma grande surprise admise a Dauphine,et donc j’ai fait à Dauphine un licence d’éco gestion.
En troisième année je me suis rendue compte, je me suis spécialisé en troisième année en gestion et je me suis rendu compte que ça me ne plaisait pas, Et j’ai basculé en licence de sociologie au deuxième trimestre, donc à Dauphine c’est un peu particulier parce que même en licence de sociologie on continue l’économie Donc c’est une licence qui s’appelle « sciences des organisations et des marchés mention sociologie ».
Voilà j’ai adoré, j’ai continué une première année de sociologie, enfin un M1 de sociologie et de sciences politiques et j’ai ensuite arrêté pour travailler un petit peu parce que je ne savais pas quelle M2 faire, puis j’ai repris un peu plus tard en master MEEF donc le master qui prépare ou qui prépare au concours des enseignants.
Merci Maryam, et justement tu dis que tu as à travailler Est ce que tu peux nous en dire plus un petit peu sur combien de temps tu à travailler dans quel type de poste ?
8:49
Alors oui donc j’ai déjà le temps de mes études, j’étais vendeuse, chez André, je ne sais pas si on doit dire des marques mais je vendais des chaussures Voilà, quand j’ai arrêté en M1 j’étais assistante pédagogique à Garges les Gonesse, donc j’avais un premier pied dans l’éducation nationale, j’étais assistante pédagogique de mathématiques alors que c’était pas vraiment mon fort dans un lycée Donc Garges les gonesse.
Ensuite, l’année suivante j’ai arrêté, j’ai eu une période de flou, je ne savais pas dans quoi travailler, quoi faire, ou j’avais un peu du mal d’ailleurs à trouver du travail.
Et puis un jour on m’a contacté, le hasard, on m’a contacté parce que une amie
de mon oncle
qui était professeur documentaliste à Garges lès Gonesse, donc au collège cette
fois-ci qui était malade et donc en mi-temps thérapeutique avait besoin de de
quelqu’un qui complète son service pour que le CDI puisse être ouvert mais manquant d’argent
et de poste J’étais donc recruté comme assistante pédagogique mais pour faire
le travail d’un professeur documentaliste. Donc le professeur documentaliste c’est
la dame des CDI, la dame avec ses lunettes, qui dit shhhh il y a trop de bruit
ici Voilà. Donc j’ai fais ça pendant 2 ou 3 ans, pendant 2 ou 3 ans je ne sais
plus et, des la fin du lycée Je voulais
être enseignante de SES mais à l’époque il y avait très peu de postes, Il me
semble que au moment où je suis sorti du lycée il y avait 61 poste au niveau
national, donc en bonne petite fille issus des milieux populaires qui a pas
confiance en elle Qui se dit Mais pourquoi moi ? Pourquoi je serais prise ?
Je m’étais dit que c’était pas fait pour moi donc j’avais abandonné l’idée, Puis
au moment où j’étais professeur documentaliste ça m’a plu et j’ai voulu
préparer le concours, donc je l’avais un peu préparé pas très sérieusement, puis
je me suis rendu compte que vraiment ce que je voulais c’était être professeur
en classe et de SES, parce que c’est vraiment une matière, on en reparlera plus
tard que j’adore, une matière non, mais des disciplines parce que c’est de
l’économie, la sociologie que j’adore. j’ai tenté ma chance, je me suis préparé
et contre toute attente je l’ai eu la première année où j’ai préparé ce qui est
assez rare Voilà Et du coup quand je revois mon parcours que ce soit pour la
prépa, que ce soit pour Dauphine, que ce soit pour le concours je me rends
compte que la plupart du temps, celle qui se mettait des bâtons dans les roues
c’est moi, c’est mon manque de confiance en moi en fait qui… et le manque d’information
très clairement Mais le fait que je manque de confiance en moi ça m’a empêché
de faire beaucoup de choses a des moments où je voulais les faire parce que je
me disais toujours que j’avais rien plus que les autres et que à partir du
moment où il y avait de la sélection, Il n’y avait aucune raison que je fasse partie
des sélectionnés.
Voilà.
Merci beaucoup pour ce témoignage très très intéressant.
Je me suis noté deux petites choses, tout d’abord tu as arrêté les études et puis tu les as repris, donc c’est pas le cas de tout le monde ça exige de beaucoup de courage et c’est aussi un cheminement qui n’est pas simple Et aussi tu as parlé du manque de confiance en toi et du manque d’information Et c’est justement ceux contre quoi on essaye de lutter une association comme l’ascenseur social.
Tu as aussi dit que tu venais d’un milieu populaire Est ce que tu peux nous en dire un petit peu plus, que faisait, font tes parents par exemple ?
Alors, oui donc ma mère était alors quand j’étais jeune, elle a été pendant un
temps, employé dans une banque et puis elle a été professeur d’alphabétisation
donc pour la mairie de Garges les Gonesse, elle a travaillé aussi dans des
centres sociaux et culturels et elle a aussi fini par reprendre ses études, alors
tu disais que reprendre ses études ça demandait beaucoup de courage, en réalité
dans mon cas pas tant que ça parce que j’ai toujours arrêté en disant je me
laisse le temps de réfléchir, Mais dans ma tête il n’était pas question que je
ne reprennent pas les études, j’avais juste besoin d’un peu de temps, je savais
pas quoi faire avec un M1 de sciences politiques et de sociologie, Et
d’ailleurs tout le monde quand j’avais changé de voie me disaient « Mais
qu’est-ce que tu vas faire avec », et
en réalité on rebondit toujours, donc il faut arrêter de se dire il n’y a pas
de boulot.
Faut avoir le courage de faire ce qu’on aime, mais par contre là où celle qui a été vraiment courageuse à mon sens c’est ma mère qui a repris ses études, elle devait avoir au moins cinquante ans qui a repris une licence, qui a passé un diplôme qu’elle a obtenu, pour travailler ensuite dans une association toujours à Garges lès Gonesse en tant que médiatrice école famille, donc elle était contacter soit par des écoles, soit par les familles quand il y avait des moments de tension de conflits, des crispation en fait sur des situations assez particulière, voilà elle intervenait comme médiatrice.
Génial, comme tu a dit, ça demande du courage.
Tout à fait, et pour mon père en fait mon père est décédé quand on avait, quand moi j’avais 2 ans mon frère et ma sœur était plus grands et ma mère nous a élevés tous les trois seule, Voilà, depuis le décès de notre père et voilà ça demande d’autant plus de courage que voilà… qu’elle était seule avec des enfants, voilà.
Merci beaucoup, qu’est-ce que l’ascenseur social pour toi ? Et comment s’est-il exprimé dans ton cas ?
Alors l’ascenseur social, je vais vous faire une reponse de professeur de SES,
c’est qui permet donc une mobilité sociale ascendante, Donc c’est ce qui permet
de passer d’une position dans la société a une position plus élevé voilà, alors
comment ça s’est traduit pour moi.
Alors moi c’est toujours un peu délicat parce que… au vu des différentes fonctions qu’elle a occupé ma mère je ne sais pas si statistiquement je rentre bien dans cette idée d’ascenseur social, mais bien-sûr, en dehors des statistiques bien sûr que ce que c’est l’ascension sociale que j’ai connu et ne serait-ce que d’avoir quitté Garges ça se traduit aussi une manière, spatialement J’étais dans le 95, je suis dans le 94, j’ai habité à Nogent sur Marne c’est pas du tout la même chose, aujourd’hui je suis enseignante, donc du second degré, donc je fais partie des cadres et professions intellectuelles supérieures.
Voilà.
Donc on peut dire que tu as pris l’ascenseur social.
Voilà donc on peut dire… après si tu veux, est ce que je ressens par rapport à ma mère, pas forcément, statistiquement pareil je ne suis pas sûr de rentrer dans les statistiques, c’est le problème des statistiques, c’est qu’il y des situations un peu particulière, mais oui globalement, avec le recul bien-sûr que j’ai pris l’ascenseur social et je l’ai pris aussi grâce au choix qu’a fait ma mère pour moi, de m’avoir mis dans le privé, mais pas que, de m’avoir toujours poussée dans les études etc…
Justement tu à parler du fait que ta mère t’a beaucoup aidé ? Est ce qu’il y a d’autres personnes qui t’ont aidé justement dans ta réussite ?
Qu’ils m’ont aidés, bah j’ai eu de la chance parce que j’ai souvent des profs qui croyait, des professeurs qui croyait plus en moi que moi en moi, voilà Donc je me souviens qu’au moment où j’étais au lycée que j’hésitais, c’était les professeurs qui m’avait poussés à demander des classes préparatoires, même si je savais que ça correspondait pas vraiment à mon profil parce que je n’étais pas une grande bosseuse, et aussi je pense que le passé il est temps de ma famille parce que j’ai une famille de détente.
Ça aussi beaucoup joué dans ma réflexion dans l’acquisition d’un esprit critique, dans le développement, de ma réflexion et d’ailleurs c’est marrant parce que j’avais une tante qui est décédé aujourd’hui mais c’est elle qui me parlait souvent de grandes écoles Elle me disait Oui tu feras quoi bien- sûr dans sa représentation à elle réussir c’était être avocat ou médecin, mais la première fois qu’on a parlé de grandes écoles c’était cette tante la qui était pionne, qui restait des années pionne dans un dans un collège qui elle n’a pas fait de grandes études, mais bizarrement elle a dû côtoyer des personnes qui elle en avait fait et elle avait comme ça des noms de grandes écoles, Polytechnique, l’ENA.C’est la première a m’avoir parler des grandes écoles. Donc je dirais globalement les enseignants que j’ai eu et ma famille.
Tu as parlé du fait que tu étais arrivé à Dauphine qui est pas réputé pour sa mixité sociale, et justement quelles ont été les défis auxquels tu as dû faire face du fait de ton milieu social d’origine ? Et comment les as-tu surmonter ?
Ça a été dur au début, je me souviens de la première fois de la prérentrée donc à Dauphine, dans un amphi, et je suis arrivée seule parce que j’étais la seule de mon établissement et de ma classe avoir été avoir été admise à Dauphine.
Je suis arrivé seule et je me souviens d’avoir observé autour de moi et d’avoir laissé un message à ma sœur en lui disant que « mais j’ai envie de pleurer » parce que je voyais le profil des personnes autour de moi et je me sentais très différente et c’est vraiment à ce moment-là que j’ai pris ma première claque dans la tronche.
Voilà parce qu’on rend tout de suite compte qu’on n’a pas les mêmes normes vestimentaires, qu’on a pas les mêmes façons de parler, qu’on a pas la même vie, qu’on a pas les mêmes activités, qu’on n’a pas… Ça a été difficile de créer du lien.
J’ai quand même créer du lien avec quelques amis à moi qui venait de divers horizons, Mais si vous voulez en réalité les amis que j’ai encore aujourd’hui et avec lesquels on se sent un peu plus avec lesquels on se sent proche c’était des personnes avec le même profil sociale que moi, d’ailleurs elles venaient de Goussanville et de Villiers le Bel, donc du 95, c’est très proche, après ça m’a pas non plus empêché de m’ouvrir aux autres et les autres aussi, de s’ouvrir à moi mais après on n’a pas créé les mêmes, les mêmes amitiés, Et puis il y a des moments où j’ai subi la violence symbolique de plein fouet, fin, une claque au visage où là on se dit effectivement ouais on vient pas du tout du même monde et j’ai une anecdote que je raconte souvent parce que vraiment pour moi ça a été aujourd’hui en sociologie quoi je l’explique mais sur le coup ça a été ça a été hyper violent D’ailleurs Brodieu parlerai de violence symbolique.
Mais je parlÉ avec une fille de Dauphine, Alice qui était très
gentille mais qui n’est pas du tout du même milieu social, je pense qu’elle
devait venir probablement de la bourgeoisie et elle me dit qu’à son
anniversaire elle avait demandé une montre et moi hyper naïvement, parce que je
connais la marque Swatch, pour moi c’était une marque pas une marque de luxe
mais une marque connue, une marque avait son magasin au Champs-Élysées et moi naïvement
je dis « mais je ne sais pas si t’as vu mais Swatch ils font de super jolie
montre », et elle me regarde et elle me dit non mais Swatch c’est pour les
pédés, moi je veux une montre Hermès.
Alors cette anecdote ça me fait rire, on a même pas elle est violente parce que parce que à ce moment-là je me rends compte qu’on ne vient pas du même monde genre jouer un petit peu de temps en temps Et puis je me souviens dans une quand j’étais en L2 pour rigoler on m’appelait, alors c’était vraiment pour rire, c’était, et d’ailleurs ça avait été ça avait été amené par moi ce genre de blague, c’était vraiment pas humiliant pour le coup, mais on m’avait appelé une fois Maryam du tcheqar, voilà mais ce qui est assez drôle c’est que à la fois Dauphine je ne me sentais pas à ma place, parce que
je ne me sentais pas toujours à ma place, d’accord parce que j’étais pas non plus exclue, je me sentais pas toujours à ma place, j’ai vécu des petits moments de violence symbolique comme celui-là, mais en même temps Garges les Gonesse non plus, j’ai le souvenir d’une cousine à moi, un soir on était sorties tous ensemble et elle m’avait dit Mais pareil pas méchamment, pas pour se moquer, elle m’avait dit, « Mais toi c’est pas comme nous tu fais bourgeoise ».
Voilà Et de la même manière quand j’étais assistante pédagogique Simon de Puovoir, j’habitais
dans la même rue que le lycée et un jour les élèves me demande d’où vienne je
leur dis de Garges les Gonesse et les élèves pensais que je venais de Paris, et
en fait c’est c’est vraiment le…
C’est vraiment en même temps à Dauphine j’avais pas les codes etc… mais j’avais pas non plus tous les codes de mon milieu social qui faisait que j’étais considéré un peu différente à Dauphine et qu’on me considéré différente même dans mon milieu social, voilà, donc c’est quand même quelque chose qui est pas difficile à vivre ma m’a jamais dérangée, je me suis jamais sentie moins importante que quelqu’un mais, voilà parfois on se demande quand même, finalement, si à Garges je ne suis pas comme les autres, et que à Dauphine je ne comme les autres, à quel moment je suis un peu comme les autres quoi.
Donc voilà.
En faisant une petite aparté c’est un peu parfois le problème des binationaux entre guillemets les gens qui ne sentent pas forcément chez eux a un endroit et pas forcément chez eux a un autre endroit et et je vois totalement ce que tu veux dire.
Comment as-tu expliquait à ton entourage tes choix d’études et ton choix de carrière ?
J’ai pas eu à l’expliquer, je pense que j’ai toujours été une bonne élève, que
ma famille la dessus, ma mère a fait le choix de me mettre dans le privé et
donc moi, d’ailleurs c’est pas que moi, j’ai un cousin aussi qui lui avait fait
une S, On était un petit peu voilà on avait l’espoir de ma famille, et quand je
parle de ma famille c’est la famille élargie, mes tantes, mais oncles, parce
que j’ai eu la chance de grandir avec toute ma famille dans la même ville.
Voilà donc voilà on était un petit peu, voilà, on représentait, ceux qui allaient réussir à l’école et qu’ils connaisse une ascension sociale. Or parce qu’ils avaient des projets un peu plus prestigieux pour moi que enseignant, mais dans tous les cas j’ai pas eu besoin d’expliquer, j’ai pas eu besoin de… ça s’est fait naturellement Et encore une fois j’ai eu le soutien de ma mère qui m’a toujours dit que je pouvais vraiment faire ce qui me plaisait.
Les enseignants, c’est prestigieux, je le rappelle à nos auditeurs, être enseignant c’est un très beau métier, c’est un des plus beau métier du monde, un métier assez dure, mais c’est un très beau métier. Justement étant donné que tu est enseignante en SES Et donc, est ce que tu pourrais nous parler un petit peu, parce que comme tu l’as dit souvent on dit oui il faut aller en S et pourtant il y a de très belles réussites aussi en passant par l’ES.
Alors en fait et c’est ce que je me tue à dire aux élèves, Il y a de très
belles réussites quelle que soit la filière que les élèves choisissent.
On pense que une S va ouvrir toutes les portes, ce n’est pas vrai, s’ouvre
toutes les portes, Tu dois être excellent en S, d’accord mais une ES donc
économique et sociale comme spécialité, c’était plus adapté à mon profil et
honnêtement aujourd’hui j’aurais pas eu ce parcours là j’aurais pas etait
admise à Dauphine si j’avais été en S, d’abord parce que je n’avais pas un
profil de S, je n’étais pas à l’aise dans les matières scientifiques donc
j’aurai très probablement jamais donc la première de ma classe, ou au prix d’un
très lourd d’un… beaucoup d’efforts et encore parce qu’il y avait des élèves
vraiment brillant, j’ avais des amis en S qui était qui était vraiment vraiment
brillants.
Voilà j’aurais pas eu ce parcours-là, j’aurais pas été la première de ma classe Et puis en fait je trouve que c’est vraiment dommage que tous les élèves quelle que soit la filière ne fasse pas des sciences économiques et sociales, voilà ça devrait être obligatoire, ça devrait être, ça devrait faire partie du tronc commun, tous les élèves quelle que soit la filière choisi, devrait faire pas seulement une heure et demi en seconde comme depuis cette année mais faire des SES, de la seconde jusqu’à la terminale parce que vraiment ça m’a permis de comprendre sur moi, sur mon état, sur ma situation, des choses que j’aurais jamais pu comprendre, autrement qu’avec des explications avec des explications sociologiques, Et la sociologie dans mon cas a été vraiment libérateur, mais de la même manière ça ne sert à rien d’aller en ES si on n’a pas le profil pour une ES, si jamais, j’ai des élèves qui ont peur de la STMG ou qui ont peur des BAC pro parce que malheureusement ce sont des filières qui jouissent de très mauvaise réputation, et pourtant un très bon élève de STMG, peut aussi faire de très bonnes études, Voila ou comme je le dis, un élève de base pro fait quelque chose dans la cuisine ou qui peut aussi avoir une grande réussite et malheureusement aujourd’hui on a des filières qui sont hiérarchisées, on a des voix qui sont hiérarchisées on a des parents qui n’écoutent pas toujours les conseils des enseignants, moi j’ai eu de la chance parce que ma mère n’a pas foncer, elle a quand même écouter ce que lui a dit dit l’enseignant, donc on a des parents qui n’écoutent pas les enseignants, on a des enfants… et en fait tout ça s’est nourri que par des a priori, que par des représentations de la réalité qui sont pas la réalité en elle-même et du coup on a des élèves hyper mal orientés, moi par exemple dans ma classe de terminale, en ES, j’ai beaucoup d’élèves, qui demande finalement des BTS parce qu’ils veulent pas poursuivre des études longues, le problème c’est qu’ils sont pas prioritaires sur les BTS, mes élèves qui sont prioritaires sur les BTS sont les élèves de STMG, donc j’ai envie de dire tu veux pas faire d’études longues.
C’est un rapport assez compliqué à l’école, il vaut mieux que tu fasses une
très bonne STMG, tu seras probablement plus facilement pris en BTS que si tu
fais une ES médiocre, et moi aujourd’hui à l’heure actuelle, à l’heure des…
avec les résultats sur Parcoursup j’ai des nombreux élèves qui n’ont rien parce
qu’ils se sont mal orientés parce qu’ils ont préféré faire des filières pour
lesquelles dans lesquels ils allaient être en difficulté parce qu’il pensait
que le prestige de la filière suffirait a relevés les difficultés alors que
c’est pas du tout le cas, c’est pas du tout le cas et aujourd’hui s’orienter
correctement c’est à mon avis une étape importante pour réussir et quel que
soit, quelle que soit sa conception de la réussite.
Mais après encore une fois quand on regarde les chiffres, qui s’orient plus dans les filières STMG, qui forcément s’oriente le plus vers les filières moins prestigieuse malheureusement c’est toujours les enfants d’ouvriers, les enfants d’employés, donc les classes populaires et ceux qui s’oriente plus vers des filières prestigieuses renommées etc… ce sont les enfants de cadres et de professions intellectuelles supérieures et c’est comme ça que les destins des individus, enfin par rapport à se ses parents, je ne sais pas si je suis très clair mais, voilà et je pense qu’il y a un gros travail à faire sur les filières, sur le prestige des filières, mais pas un travail seulement tant que en tant que famille ou en tant que professeur mais vraiment au niveau de l’éducation nationale pour revaloriser des filières, et voilà, et un travail d’information, parce qu’il n’est pas normal qu’aujourd’hui la plupart des élèves que j’ai en terminale, et pourtant moi je suis dans un dans un milieu, j’enseigne à Maisons Alfort donc ce n’est pas des classes populaires, mais voilà des élèves qui ont jamais entendu parler de certaines écoles, comme moi a leur époque qui ne savent pas ce que c’est qu’une prépa et comme ils ne savent pas ce que c’est que une prépa, ils font pas de prépa. moi mes meilleurs élèves cette année n’ont pas demandés de prépa ils ont pas demandé prépa, pourquoi ? Parce qu’ils ne savent pas ce que c’est qu’une classe préparatoire.
Et ils ont peur, ils ont peur de la concurrence, ils ont peur de ne pas être, ne
pas être assez bon etc….
Merci Maryam c’est ce que tu as dit
est très important, justement pour conclure, quels conseils donnerais tu
aujourd’hui a un jeune qui a envie de réussir ?
Je ne sais pas, quel conseil que je donnerais un jeune ?
alors je veux dire le conseil que je donne à mes élèves et que je donnerais à n’importe qui, c’est plus facile à dire qu’à faire et que j’aurais aimé qu’on me donne, c’est de ne pas se mettre des bâtons dans les roues soi-même, je veux dire l’institution, les institutions de manière générale et notre entourage, en rajoute déjà assez pour que nous on s’en rajoute voilà.
et il faut qu’on ait confiance en nous parce que sinon nous n’avons pas confiance en nous, personne n’aura confiance en nous à notre place.
Donc il faut tenté, ce n’est pas grave, il vaut mieux tenter et échoué, que se dire, je ne suis pas assez bon pour ça et je ne tente pas parce que si je m’étais écouté, aujourd’hui je ne serais pas professeur de SES, si je m’étais écouté j’aurais pas fait Dauphine et surtout si j’avais écouté les autres, parce que je me souviens d’une rencontre avec d’anciens élèves ou une fille m’a clairement dit Mais « écoutes moi Dauphine j’ai pas eu tu l’auras jamais »
Voilà Et bizarrement, dans mon caractères, j’accepte de ne pas avoir confiance à moi, j’accepte de me mettre des bâtons dans les roues, mais je ne veux pas que ça vienne des autres et donc le fait qu’elle me dit ça, que c’était même pas la peine de postuler, quelque part ça m’a transcendé et ça m’a poussé à réussir.
Donc le conseil que je donnerais à toutes les personnes qui m’écoutent c’est essayer, échouer ce n’est pas grave, mais pas essayé c’est problématique, parce qu’en réalité on sait jamais ce qu’il peut se passer, on sait pas ce qui peut se passer, on s’est passé d’une année à l’autre, Il ne va pas y avoir, comme cette année par exemple pour le baccalauréat, enfin des circonstances exceptionnelles qui font que le baccalauréat, les élèves ont obtenu par rapport à leur contrôle continu, voilà, parfois il y a des circonstances exceptionnelles qui joue à la faveur de certaines personnes et le problème c’est que si on n’essaye pas si on joue pas jeu, si on ne croit pas en soi et bah on pourra jamais profité de ces circonstances exceptionnelles et parfois tout simplement le talent on l’a, mais on ne sait pas on ne sait pas parce qu’on peut pas le voir nous-même.
Voilà donc tenter, il vaut mieux tenter et échoué que de ne pas tenter et par
contre ce que je dirai aux enseignants et aux adultes qui m’écoutent c’est de
ne pas hésiter très tôt à parler aux élèves,
des opportunités, de parler aux élèves des classes préparatoires, de leur expliquer qu’est-que c’est une classe préparatoire, de leur parler des grandes écoles, de leur parler du Polytechnique, de leur parler de L’ENA, de leur parler de Science Po etc… des grandes écoles,
parce que peut-être que plus on fera naître chez eux des vocations ou un intérêt en tout cas pour les grandes études et plus ils seront apte a s’y préparer, voilà, Mais je pense que l’école joue un rôle important que… en fait c’est l’institution va jouer un rôle important Voilà, dedans et moi j’étais enseignant dans des milieux populaires, j’étais assistante pédagogique, professeur documentaliste, et j’ai vu, j’ai été aussi animatrice et j’ai beaucoup parlé aux gamins, dans ces milieux-là, et je me rends compte qu’en fait ils ne connaissent pas grand-chose souvent les métiers qui connaissent les métiers qui connaissent et les métiers pour eux qui sont des métiers socialement reconnu c’est avocat, ingénieur, médecin et souvent les autres métiers, ils ne les connaissent pas, et ce n’est pas de leur faute parce que souvent leurs parents c’est n’est pas des métiers que leurs parents font, c’est n’est pas des métiers que leurs parents font, parce que je ne connais personne qui habite à Garges-Les- Gonesse qui m’a dit un jour, moi mon père il est contrôleur de gestion et gestionnaire de patrimoine dans une grande banque, voilà où il est tradeur, non ce sont des métiers qui ne connaissent pas Ils sont entourés de personnes qui ont le même profil sociologique, qui font les mêmes choses qu’eux, ou les parents font un peu près le même métier etc… et du coup ce sont des choses qu’ils ne connaissent pas, et quand on ne connait pas et bah on peut pas se préparer.
Voilà donc c’est important d’en parler, Voilà et c’est aussi important de
pardon mais là je notre ministre de l’éducation nationale qui avait expliqué
que la sociologie c’était problématique parce que c’est trop pessimiste, en réalité
ça me semblerait important que tout le monde fasse de la sociologie et y
compris les enseignants, même surtout les enseignants, peu importe ta
discipline parce qu’en fait on se rend compte de choses, de difficultés qu’ont
nos élèves dans certains domaines, qui ne sont pas en réalité des difficultés
individuelles, mais qui sont des difficultés collectives, qui sont des
difficultés sociales et pour lesquels il ne faut pas lutter, comme si c’était
une difficulté individuelle, voilà c’est à dire que si vous avez un élève qui est
en terminale parce que moi j’en ai, sais pas écrire correctement, ce n’est pas
parce que c’est un élève qui est bête, c’est parce que certainement c’est un
élève qui a grandi dans un milieu social, ou la maîtrise du langage n’est pas
la norme la plus importante et donc ils arrivent avec des difficultés.
Mais dire a cet élève-là est nul en français ça a aucun intérêt, Il faut comprendre pourquoi est-ce que il se retrouve ce type d’élève là avec tel type de profil, à quel type de difficultés, pour agir dessus, et encore une fois moi pour avoir travaillé dans différents milieux, parce que j’ai aussi été à Créteil, j’étais à Garges etc, je me rends compte que des élèves de milieux populaires en tant qu’enseignant, il ne faut pas avoir la même approche que des élèves d’autres milieux, j’ai été à Nogent, par exemple les élèves de Nogent n’attendent pas en tant que professeur la même chose de moi que les élèves de Créteil, et…. alors ça peut paraître aussi paradoxal de dire qu’il faut les traiter différemment, alors attention je ne dis pas il faut les sur noté etc… ce n’est pas ce que je dis, je dis juste que ces élèves-là ont des attentes qui sont un peu différentes, ont des difficultés qui sont différentes, Il faut qu’on sache les identifier, il faut aussi qu’on sache s’y adapté, voilà, il faut qu’on soit un peu élastique, en fonction du milieu dans lequel on enseigne et en fonction de la République, et je pense vraiment que les enseignants ont un rôle à jouer hyper important.
Maryam, merci beaucoup pour ce témoignage et pour cette prise de position forte mais très intéressante.
J’espère que nos auditeurs apprécieront ton témoignage et même tes recommandations, parce que tu as quand même dis que tu n’avais aucun conseil après t’y est allée.
Mais voilà, c’était génial Merci
beaucoup, pour ton parcours et bientôt.
A bientôt.
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